Il y a quelques décennies à peine, l'Afrique occidentale faisait face à une situation de crise, était appauvrie et se trouvait au bord de l'effondrement économique. En 2019, elle compte cinq des économies à la croissance la plus rapide, notamment le Ghana, la Mauritanie, le Maroc, le Sénégal et la Côte d'Ivoire. À quoi est due cette dynamique de croissance ?
Outre le fait que la majeure partie de cette croissance est stimulée par le rebond du prix des matières premières et l'effort particulier déployé par ces pays pour remettre de l'ordre dans les finances publiques, bon nombre de ces pays ont également mis en œuvre des mesures visant à renforcer la transparence, améliorer la gouvernance et attirer des entreprises. Citons pour exemple la place financière récemment constituée, la Casa Finance City (CFC), au Maroc qui tente dans une certaine mesure de reproduire ce qu'a déjà réalisé Maurice en devenant un centre économique et financier servant de plateforme de transition entre le nord et le sud. CFC a pour objectifs d'attirer les institutions internationales et les investisseurs et de les encourager à investir et à s'implanter en Afrique de l'Ouest, du Nord et du Sud en choisissant Casablanca comme porte d'accès à la région.
L'Afrique, dans son ensemble, en tant que continent le plus riche en ressources de la planète a connu une croissance rapide lors des deux dernières années. L’ensemble du territoire a été marqué par la croissance, avec plus d'un tiers des pays africains enregistrant des taux de croissance de 6 % ou plus, et 40 % d'entre eux affichant une croissance de 4 % à 6 % par an.
Sanlam a rapidement identifié ce phénomène et comme le montre sa stratégie 2019, le Groupe a choisi de mettre l'accent sur la diversification hors de l'Afrique du Sud, en raison de la croissance stagnante sur le marché des assurances sud-africain plus développé. Afin de générer des rendements viables à long terme pour le Groupe Sanlam Pan Africa (SPA), un cluster au sein du Groupe est devenu un axe principal et sera le moteur qui permettra d'atteindre cet objectif stratégique critique.
Malgré une réussite qui a fait couler beaucoup d'encre, Maurice demeure inconnue de certains pays d'Afrique de l'Ouest. Que peut-on faire pour que Maurice profite de cet essor du continent ouest-africain ?
Le pays doit élaborer et mettre en œuvre des mesures d'incitation afin d'attirer davantage de sociétés de capital-investissement et les convaincre d'établir leur siège social à Maurice. Des mesures d'incitation sont également nécessaires pour attirer des sièges sociaux africains à Maurice. La juridiction devrait investir dans des tournées de présentation (roadshows) plus fréquentes et plus ciblées. Des tournées qui devraient inclure les secteurs de services financiers bancaires et non bancaires ainsi que les organes de réglementation.
D'autre part, au niveau local et comme travail préparatoire, des cellules de travail peuvent être créées en tant qu'organes de décision pour prendre en charge cette région d'Afrique, à titre exclusif ou conjointement avec d'autres économies croissantes similaires, afin que tout effort consenti englobe plusieurs secteurs de notre économie. Cela permettra aux régions ouest-africaines, par exemple, de nous percevoir comme un guichet unique et nous rendra plus attractif en tant que partenaire potentiel.
Nous devrions trouver un juste équilibre entre adopter une attitude sélective quant à l’orientation de nos efforts et investissements et la nécessité de comprendre ces économies dans une optique plus large afin de ne pas passer à côté d'occasions et de se tenir au fait des défis présentés. En fin de compte, c'est uniquement en établissant des partenariats avec ces pays que nous pourrons profiter de cet élan de manière significative et durable sur les plans microéconomique et macroéconomique. Après tout, nous avons nous-même connu une phase de croissance et sommes très bien placés pour partager et coordonner cette croissance régionale.
Investie dans son rôle de passerelle entre l'Afrique, l'Asie et le reste du monde, Maurice a longtemps été considérée comme plateforme idéale pour l'orientation d'investissements vers les secteurs porteurs des pays africains. Comment peut-elle jouer un rôle de facilitateur important et contribuer à la croissance en Afrique de l'Ouest ?
Avec plus de conventions de non-double imposition (DTA) signées que tout autre pays africain, Maurice s'est forgé une excellente réputation en tant que centre financier sûr, fiable et compétitif, ce qui lui a permis de se positionner comme juridiction privilégiée pour les flux d'IDE vers le continent. Forte d’une main-d'œuvre capable de satisfaire les besoins de l'Afrique francophone comme anglophone, Maurice n'est pas uniquement utilisée en tant que juridiction à faible fiscalité, mais est désormais classée numéro 1 en Afrique selon le rapport 2019 la Banque mondiale, et 13e au monde en termes de la facilité d’y faire des affaires. Le pays n’est pas devenu une juridiction de choix dû au hasard.
Toutefois, nous ne devrions pas nous reposer sur nos lauriers car le monde étant « au ralenti », d'autres juridictions mettent les bouchées doubles pour tenter de nous défier. Nos conventions de non-double imposition devraient être revues, comparées à celles des concurrents et signées lorsqu'elles sont en attente de signature et de ratification. Faute de quoi, cela nous ralentira et nuira à notre évolution.
Et c'est là que Sanlam Trustees International Ltd.is joue un rôle crucial en tant que facilitateur d'affaires. Le Groupe étant physiquement présent dans plus de 33 pays d'Afrique et disposant de compétences au niveau de la mise en place de structures mauriciennes, nous sommes capables d'accompagner les investisseurs africains dans de nombreuses juridictions. Par exemple, en plus de notre équipe expérimentée anglophone, nous disposons désormais d’un « French Desk » pleinement opérationnel qui est au service des clients francophones.
Est-ce que le profil de Maurice en tant que juridiction de renom en matière de levée de fonds peut être renforcé en Afrique de l'Ouest à travers la promotion d'initiatives dans le domaine de la durabilité - au moyen de notre propre SEM Sustainability Index avec les entreprises durables cotées en bourse servant d’exemples - afin que ces pays puissent apprendre et adopter un mode de fonctionnement durable, ce qui ferait de nous des partenaires et des collaborateurs précieux dans leur développement responsable ?
Maurice est la juridiction de choix pour les investissements en Afrique et ses caractéristiques géographiques, fiscales et non fiscales sont des facteurs déterminants. Toutefois, une partie importante de ces investissements, en particulier à destination de l'UE, transite par d'autres juridictions et il s'agit là d'une piste que nous devrions explorer et chercher à exploiter. Il est clair que, pour les économies ouest-africaines en pleine croissance, le SEM Sustainability Index est un atout favorisant notre juridiction.
Notre pays a déjà connu des transformations économiques et ces changements ont été bien abordés même si des améliorations sont toujours possibles. Aujourd'hui, nous avons en place des infrastructures adéquates, une main-d'œuvre qualifiée performante et sommes axés sur l'innovation dans des domaines tels que la fintech et la regtech, etc. Autant d'éléments réunis qui constituent pour nos homologues d'Afrique de l'Ouest de précieux atouts car il s'agit là, ou en tout cas cela devrait l'être, des objectifs de leurs initiatives économiques, environnementales, sociales et de gouvernance.
Bien sûr, cette métamorphose ne se fera pas du jour au lendemain. Nous devons garder à l'esprit que malgré cette croissance en Afrique de l'Ouest, qui selon toute vraisemblance sera soutenue, la région demeure une zone vulnérable aux instabilités, politique et sociale. Outre le bénéfice économique, être en affaire avec nous, en tant que partenaire ou collaborateur, peut avoir un effet tampon et constituer un argument de vente pour les pays ouest-africains lorsque ceux-ci ciblent les investisseurs et les investissements. L’Afrique de l'Ouest peut ainsi bénéficier, de manière directe et indirecte, de nos infrastructures, de nos cadres réglementaires - incluant l'AML/CFT pour la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, de notre technologie et de notre expertise humaine. Ils peuvent tirer des leçons de nos défis passés et actuels et des mesures prises pour relever ces défis.
Les pays d'Afrique de l'Ouest sont entrés dans une ère passionnante - des jeunes technophiles, des services financiers tels que l'argent mobile ou les services bancaires numériques, l'affacturage, le microfinancement des petites et moyennes entreprises - autant de possibilités que de débouchés sur les marchés, toujours plus diverses, et ce tout en répondant aux besoins d'un développement durable. Nous ne pouvons qu’être tournés vers l'avenir et nous sentir fiers d’œuvrer ensemble pour une croissance mutuelle.